Poussés par l’austérité des changements climatiques, les mbororos sont contraints à la migration et font face à diverses difficultés dans leurs nouveaux milieux de vie. Considérés comme des envahisseurs par les populations locales, ces pasteurs émigrent vers la partie centrale de l’Afrique et développent des mesures de résilience pour leur survie.
Ango et Bondo sont deux territoires de la province du Bas-Uelé au Nord-Ouest de la RDC, connaissent un afflux massif des migrants climatiques depuis 2002.
Le rapport de IKV Pax d’avril 2007, indique que les mbororo appartiennent à l’ethnie Falatha ou Foulani, l’un des plus importants groupes ethniques d’Afrique occidentale. On les rencontre dans plusieurs Etats africains notamment en République centrafricaine, au Tchad, en Lybie, au Nigeria, au Niger, en Mauritanie, au Cameroun, … Leur présence au Nord-Ouest de la RDC est source des conflits. Les populations locales les accusent de détenir des armes à feu et de détruire leurs champs au-delà des eaux des rivières qui sont souillées par leurs bêtes.
«Les mbororo vivent principalement de l’élevage. Ils sont intimement liés à la vache qui représente pour eux non seulement la richesse et un prestige social, mais aussi leur assure la sécurité alimentaire pendant que leurs femmes s’adonnent à la vente de lait de vache » précise Obama Mesanga, anthropologue et communicologue à l’université de Yaoundé 2 et origine de l’ouest du Cameroun qui connait aussi une forte présence des mbororo.
Bien que les changements climatiques induisent les mouvements migratoires de manière générale, mais ils ne peuvent pas être eux seuls être plausibles pour les expliquer.
A ce propos Hind AISSAOUI Bennani, fonctionnaire de l’OIM ayant en charge l’Afrique de l’Ouest et du Centre et basée à Dakar nuance en ces termes : « il est vrai que les facteurs climatiques sont très déterminants dans les migrations observées en Afrique et sur le plan international. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue la multi causalité des migrations environnementales ». Et de renchérir que « toute migration est le résultat de l’interaction d’une diversité de facteurs environnementaux, démographiques, renforçant la résilience des ménages de migrants ».
L’eau potable, une denrée rare au Sahel
Afin de réduire les inégalités au niveau mondial, les nouveaux ODD, appellent les gouvernements à garantir l’accès universel aux services sociaux de base et notamment à l’eau d’ici 2030. Cet objectif semble loin d’être atteint à près de 8 ans de l’horizon 2030 au vu du tableau macabre que peint le rapport conjoint de l’OMS et de l’UNICEF de 2017.
Ce rapport note que dans le monde, 2,1 milliards de personnes n’ont pas accès à l’eau gérée en toute sécurité et 844 millions ne sont pas approvisionnés en eau. Ce rapport indique aussi que parmi ces personnes, 263 millions vivent à plus de 30 minutes du premier point d’eau pendant que 159 millions continuent à boire de l’eau de surface non traitée et puisée dans des cours d’eaux ou dans des lacs.
Le Tchad est l’un des pays d’où proviennent les transhumants pasteurs mbororo qui émigrent en RDC à la recherche de pâturages pour leur cheptel bovin et compagnie Ils développent des solutions résilientes face à l’austérité du climat et sa cohorte de malheurs.
Dans le Sahel, la couverture et l’accès au liquide précieux posent de sérieux problèmes aux populations en dépit de gros efforts fournis par le gouvernement et les organisations internationales.
Quelques habitants interrogés au Tchad par André Kol Majinga, correspondant de la VOA dans l’émission Washington Forum lors de la journée mondiale de l’eau, dressent un tableau sombre de leur approvisionnement en eau et décrivent le calvaire qu’ils connaissent au jour le jour : « C’est bien beau de célébrer la journée mondiale de l’eau, mais de quelle eau s’agit-il ? S’interroge un habitant rencontré dans les rues de Djamena. Et de renchérir « le mois passé je suis revenu de l’intérieur du Tchad. On boit encore de l’eau des puits et quand on fait sortir cette eau, elle a une couleur rouge » s’indigne ce quinquagénaire. « Il y a même des insectes dedans. C’est vraiment le chantage du gouvernement et de la société tchadienne de l’eau » conclut-il en refrognant le visage.
Des propos d’une demoiselle, la vingtaine révolue sont mitigés. « La population tchadienne a accès à l’eau potable par rapport aux années précédentes vu les efforts fournis par le gouvernement ». Elle nuance ses propos et souligne qu’ « on ne peut pas dire que la population tchadienne a totalement accès à l’eau potable, car plus on s’éloigne de la ville, plus le problème d’accès à l’eau se fait beaucoup sentir. Même certaines provinces du Tchad connaissent ce problème d’eau. Il y a l’eau, mais elle n’est pas de bonne qualité parce qu’elle provoque des maux de ventre » se plaint-elle.
Déconstruire les prévisions alarmistes
Des propos alarmistes sont de fois nuancés par des chercheurs. « Certes que les preuves scientifiques montrent que les effets du changement climatique sont évidents, mais il n’y a pas lieu de s’alarmer outre mesure. Il faut plutôt développer des mesures d’aatténuation et d’adaptation aux changements climatiques.» précise Muhigwa Jean Berchmans, environnementaliste et professeur à l’Université Officielle de Bukavu en RDC.
Les eaux souterraines peuvent être une source de secours pendant les moments de séchage des rivières et des lacs. Le rapport de l’UNESCO aussi bien que celui produit conjointement par l’ONG Water Aid et l’Institut Britannique de Géologie rassurent qu’ « il y a suffisamment des ressources en eau pour le continent africain. Encore faut-il les rendre disponibles et accessibles pour l’eau potable et l’irrigation » rassure Mariam Dem, Directrice de projets spéciaux de l’ONG Water Aid lors d’une interview accordée à Abdourahmane Dia de la VOA en mars 2022.
Les eaux souterraines constituent une ressource palliative à même de déjouer l’apocalypse décrite par certains chercheurs climato sceptiques. Les gouvernements et d’autres acteurs impliqués dans la gestion de l’eau devront renforcer la couverture et l’accessibilité à l’eau et ainsi répondre au 6e ODD d’ici 2030.
John KADJUNGA