La République Démocratique du Congo présente un taux de défécation à l’air de 12%. Ce taux est le plus élevé d’Afrique renseigne le service d’assainissement au ministère national de l’environnement. Selon les résultats de l’Enquête par Grappes à Indicateurs Multiples MICS de 2017-2018 ce taux est de 4% en milieu urbain et 18% en milieu rural. Les auteurs de cette étude font savoir que la défécation à l’air libre impacte négativement sur la santé des humains. Selon eux, les selles humaines sont des matières les plus contaminants car 50 à 80 % des excrétas
contiennent des bactéries dont la majorité sont encore vivantes
«La mauvaise gestion des excrétas favorise la propagation de ces pathogènes dans l’environnement et ces derniers affectent négativement non seulement la santé mais aussi la nutrition, l’éducation et le bien-être de la population en général et des enfants de moins de cinq ans en particulier » rapporte cette étude.
Dr Aimé Murhula, Médecin Interniste dans la ville de Bukavu affirme qu’en situation normale l’homme fait au tour de 150g des matières fécales par jour en fonction du régime. De ces matières fécales environ 75% est fait des liquides et le 25% ces sont des matières organiques contenant des microbes vivants et morts.
« En fonction de la composition, avec les selles, on repend certains microbes dans l’environnement et ces microbes sont de fois fonction du tube digestif de celui qui les a émis. Dans l’histoire certaines maladies se sont rependues jusqu’à exterminer des populations entières. Il y a par exemple des choléras qui ont décimé plusieurs personnes puisqu’on n’a pas su gérer les selles ».
La défécation constitue un problème majeur de santé publique dans les milieux urbains comme dans les milieux ruraux souligne pour sa part professeur Donat MITIMA Dr en Environnement et développement durable.
« L’impact sur la santé humaine est évident parce que dans ces matières fécales il y a des bactéries nuisibles à la santé et qui transmettent des maladies aux humains. Principalement à travers les mouches qui vont atterrir sur ces matières fécales parce qu’elles sont à l’air libre. Ces mouches sont vecteur des maladies comme le choléra ou la dysenterie » ajoute-t-il.
L’enquête MICS révèle que les maladies diarrhéiques dues à une contamination fécale restent la cause majeure de la malnutrition chronique chez les enfants de moins de cinq ans. Environ 43% des enfants en RDC souffrent de la malnutrition chronique. Cette enquête révèle également que 14% des enfants de moins de 5 ans souffrent des maladies diarrhéiques et 3,4% des infections respiratoires aigües dues à une mauvaise pratique d’hygiène et d’assainissement et surtout à la défécation à l’air libre.
« Les enfants de 0 à 5 ans sont très affectés car ils ne sont pas trop éduqués en matière d’hygiène personnelles ou d’hygiène publique et cela entraine un taux élevé de mortalité chez eux. Quand il y a des cas de choléra par exemple, ces cas frappent beaucoup plus les enfants. Naturellement ils sont fragiles et sont affectés par ces matières et puis ces enfants consomment beaucoup des produits alimentaires qui se vendent à l’air libre. Ils sont susceptibles d’être malades car ils ne se lavent pas les mains avant de consommer ce qu’ils achètent. Ils sont donc les plus affectés par ce problème de défécation à l’air libre » renchérit Professeur Donat MITIMA.
En outre l’enquête MICS note que chez les enfants ces pathogènes fécaux causent l’entéropathie environnementale qui est un dysfonctionnement intestinal qui empêche la bonne absorption des nutriments ingérés, provoquant une malnutrition chronique. Cette malnutrition entraîne un retard de croissance chez les enfants, réduit leur capacité d’apprentissage et cause une morbidité plus élevée.
De son côté Dr Aimé Murhula souligne qu’il y a l’intérêt à bien gérer les selles, à bien faire des latrines et que ces latrines soient bien canalisées pour éviter le contact des selles avec les humains et pour éviter que ces selles n’entrent en contact avec les eaux de boisson.
« Dans des milieux où les selles ne sont pas bien gérées il y a une morbidité très importante et la morbidité affecte plus les enfants de moins de cinq ans et cette morbidité interfère malheureusement avec leur état de santé et par voie de conséquence interfère avec leur croissance ».
Pour mettre fin à la pratique de la défécation à l’air libre, les autorités congolaises ont mis sur pied une feuille de route qui vise à améliorer les habitudes des communautés en matière d’hygiène et assainissement et
accroître l’accès des ménages aux infrastructures basiques et améliorées pour réduire de 50% le taux de la contamination fécale dans tout le pays d’ici
2030.
Pascaline Mbangu Directrice d’assainissement au ministère de l’environnement et développement durable et coordonnatrice nationale de cette feuille de route affirme que l’approche utilisée par le ministère est celle de l’assainissement total piloté par la communauté. Cette approche permet à la communauté de mettre elle-même fin à la défécation à l’air libre après sensibilisation, par la construction et l’utilisation des latrines.
« On commence par sensibiliser les autorités provinciales, les autorités territoriales pour leur implication dans l’éradication de la défécation à l’air libre dans leurs régions respectives. Nous formons également les techniciens de l’environnement, les facilitateurs communautaires et à leur tour ils vont d’une communauté à l’autre pour sensibiliser ».
Au-delà de la construction des latrines, les experts recommandent également la bonne utilisation d’une latrine sans la pour éviter la contamination fécale.
Par Patrick KAHONDWA