Environ une personne sur six est touchée par l’infertilité à un certain stade de la vie, à l’échelle mondiale. C’est la révélation du rapport de l’organisation mondiale de la santé d’avril 2023 sur les estimations de la prévalence de l’infertilité de 1990 à 2021. Selon ce rapport la prévalence estimée de l’infertilité pendant la période étudiée est la plus élevée dans la Région africaine de l’OMS et la plus faible dans la Région de la Méditerranée orientale.
« Le rapport montre que 13,1 % des gens dans les régions d’Afrique connaitront le problème d’infertilité et cette proportion n’est pas significativement différente de ce qu’on a pour le reste du monde» Explique Dr Gitau Mburu participant à cette étude et Scientifique du département de santé sexuelle, reproductive et recherche de l’OMS à Genève.
Facteurs de l’infertilité
Le rapport note que l’infertilité est conduite principalement par les anomalies dans le système reproductif de l’homme ou de la femme en ajout à cela il y a l’âge avancé et les infections particulièrement les infections sexuellement transmissibles.
Dr KENNY RAHA Gynécologue Obstétricien spécialisé dans la prise en charge des couples infertiles à l’hôpital de Panzi en RDC et Enseignant de gynécologie à la faculté de Médecine de l’Université Evangélique en Afrique reconnait quant à lui que l’âge impacte aussi sur la capacité d’un couple à concevoir.
« L’infertilité est l’incapacité d’avoir une grossesse pour un couple qui est sexuellement actif sans contraception. Mais actuellement la notion de l’âge entre en compte. Pour des jeunes couples de moins de trente ans on va dire qu’il y a un problème de fertilité s’il y a l’intervalle de deux ans. Entre trente et trente-cinq ans c’est après une année qu’on peut s’inquiéter. Entre trente-cinq et quarante ans c’est après six mois. Au-delà de quarante c’est immédiatement qu’il faut trouver une solution ».
Coût élevé
Les auteurs de ce rapport de l’OMS et de la revue systématique de l’OXFORD ACADEMIC sur les coûts financiers des technologies de procréation assistée pour les patients dans les pays à revenu faible et intermédiaires notent que cette technologie est considérée comme une intervention biomédicale importante dans le monde entier vu que les patients dépensent environ la moitié de leur revenu annuel moyen pour un cycle dans les pays disposant de mécanismes de financement public. En revanche, dans les pays dépourvus de mécanismes de financement, le coût d’un cycle représentait même plus du double de leur revenu annuel moyen.
« Notre examen s’est principalement concentré sur l’inaccessibilité en raison du coût élevé du traitement de l’infertilité, souvent non couvert par l’assurance maladie dans de nombreux pays à faible revenu. En outre, les services de santé sont souvent sous-financés dans de nombreux pays à faible revenu, et il y a un manque de volonté politique pour donner la priorité au traitement de l’infertilité au milieu des défis de santé concurrents » explique pour sa part Purity Njagi co-auteur de la revue
Et au Dr Gitau d’ajouter que « L’un des vides significatifs que nous avons est que la prévention, le diagnostic et le traitement de l’infertilité dans plusieurs pays et régions y compris en Afrique n’est pas adéquat. Le niveau de prévention, de diagnostic et de traitement que nous voyons est faible et dans plusieurs endroits, le traitement est disponible dans le secteur privé et pas vraiment disponible dans le secteur public»
Cette recherche montre que dans de nombreux contextes aux ressources limitées, comme l’Afrique subsaharienne, l’infertilité est souvent négligée en raison de nombreux besoins de santé concurrents, ainsi que des taux de fécondité relativement élevés et des familles nombreuses, qui peuvent non seulement masquer l’infertilité dans les populations, mais peut même avoir eu pour effet de dissuader le financement public du traitement de l’infertilité.
Dr RAHA poursuit pour sa part que l’accès aux soins de fertilité est un besoin dans les pays africains où l’enfant a une place de choix.
« Les soins de fertilité est un problème non seulement de la santé publique mais aussi un problème social et économique. Lorsque deux personnes se sont épousé et qu’ils n’arrivent pas à avoir des enfants cela créé des discordances au niveau du couple et de leurs familles respectives » reconnait LEA BABONE président de la société civile santé en RDC.
Actions urgentes
La fourniture d’un traitement contre l’infertilité est un problème complexe qui est aggravé par un manque de volonté politique de donner la priorité à l’infertilité, en particulier dans le contexte d’autres problèmes de santé tels que les taux élevés de morbidité et de mortalité maternelle, les besoins non satisfaits en matière de contraception, les maladies évitables par la vaccination et les maladies infectieuses émergentes, jugées plus importantes selon les scientifiques.
« Pour ces raisons il est important de s’assurer que l’infertilité est priorisée par les ministères de la santé et de toutes les parties prenantes ; les pays s’assurent que les gens ont accès au traitement et je dis un traitement abordable de l’infertilité et en ajout il ne faut pas stigmatiser l’infertilité parce que dans plusieurs endroits, elle est stigmatisée. Notre rapport indique le besoin des politiques et stratégies pour aider à prévenir, diagnostiquer et traiter l’infertilité » poursuit Dr Gitau
« Il y a certains niveaux des soins auxquels les gens ne sauront accédés s’il n’y a pas des subventions. Dans nos conditions nous faisons ce que nous pouvons. L’état doit subventionner les soins de santé de fertilité. Cela va faciliter l’accès et dès qu’il y a accès aux soins de fertilité il y aura reconstruction des couples parce que les couples sans enfants dans notre communauté est un couple qui vit beaucoup de problème » renchérit Dr RAHA.
LEA BABONE plaide pour le renforcement des mesures au niveau des programmes nationaux de la santé de la reproduction et la mise en place des espaces des jeunes pour leur parler de la santé de la reproduction.
Patrick KAHONDWA